Palais De La Paix

Marche de la Paix – Carnegie

« LA PAIX PAR LA JUSTICE » 

Une marche de la paix dédiée à Andrew Carnegie

Le 11 mai 1903, le magnat de l’acier et philanthrope Andrew Carnegie (1835-1919) offrit une somme d’argent importante à l’état néerlandais pour bâtir un « temple de la paix » à La Haye, le siège du gouvernement néerlandais. Le 28 août 1913, le Palais de la Paix fut officiellement inauguré de façon solennelle en toute sa grandeur. Au début de l’assemblée, les cloches se firent entendre dans la ville entière pendant une demi-heure. Un monde plus pacifique semblait s’annoncer.

Pendant les cérémonies, on entendait non seulement le chant choral, mais aussi la joyeuse musique jouée par la Chapelle Militaire Royale établie à La Haye dans le jardin qui venait d’être aménagé. Au moins un membre de la chapelle – monsieur J.J.H. van Rosmalen – recevrait des remerciements du riche bienfaiteur Carnegie environ dix mois plus tard.

Le musicien
Jan Johannes Hendrik van Rosmalen est né le 22 février 1886 à Tiel. Il s’y maria le 7 novembre 1908. Dans la salle de l’état civil, il fut noté qu’il avait 22 ans et qu’il exerçait le métier de « musicien militaire ». Le journal quotidien de Leyde (Leidsche Courant) du 2 janvier 1909 publia un article sur le concert de la fanfare locale, Crescendo, qui avait eu lieu peu avant à Oegstgeest. « La musique a fait d’énormes progrès sous son nouveau chef-d’orchestre, monsieur J.J.H. van Rosmalen (…). »

Le 11 mai 1910, le Leidsch Dagblad annonça dans ses annonces communales la naissance de Jan Willem van Rosmalen et le métier du père fut de nouveau noté comme « musicien militaire ». Cette profession fut également notée dans le registre de la population de La Haye le 22 mai 1912 : la famille avait déménagé de Leyde à La Haye.

Un souvenir d’Andrew Carnegie resté inconnu jusqu’en 2017
La bibliothèque souhaitée par Andrew Carnegie dans le Palais de la Paix contient une modeste collection de partitions musicales, pour la plupart des marches ayant comme thème la guerre et la paix. Au printemps 2017, Rens Steenhard, employé de la bibliothèque, découvrit une marche oubliée intitulée « Peace March ». Cette marche de la paix avait été respectueusement dédiée à M. Andrew Carnegie, chevalier dans l’ordre d’Orange-Nassau. La marche fut rédigée par J.J.H. van Rosmalen, membre de la « chapelle militaire royale, régiment des grenadiers, La Haye », et une version pour piano fut imprimée au printemps de 1914.

L’œuvre musicale avait-elle été commandée?
La question est de savoir si c’était Van Rosmalen lui-même qui avait écrit et fait imprimer cette œuvre musicale. Le titre « La paix par la justice » est surprenant. La Ligue néerlandaise générale, « Vrede door Recht », existant depuis longtemps, était très active pendant ces années pour promouvoir et honorer le Palais de la Paix et son fondateur, Andrew Carnegie. Ce dernier avait reçu le titre de « membre honoraire ». Un album-souvenir spécial avait été dédié au nouveau temple de la paix ainsi qu’à son fondateur. Pour finir, la ligue offrit au Palais de la Paix un buste de l’ancêtre du droit international, Hugo Grotius. C’est pourquoi il est possible que ce soit la ligue qui ait confié à Van Rosmalen la mission de composer cette marche.

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Cette composition a reçu beaucoup d’attention dans la presse, par exemple dans le Schiedamsche Courant du 27 juin 1914, qui écrivit : « (…) M. J.J.H. van Rosmalen, membre de la Chapelle militaire royale, avait dédié une marche composée par lui-même, sous le titre ‘M. Andrew Carnegie’s Peace March’ à M. Carnegie, qui lui a fait parvenir une lettre de remerciements ». Sur la page recto de cette œuvre musicale rayonne le soleil de la justice et une image du Palais de la Paix orne également cette page.

Il est donc possible qu’un exemplaire accompagné de la lettre de Van Rosmalen ainsi que de la réponse en projet soient présents dans les archives de Carnegie. La lettre de remerciements reçue par Van Rosmalen n’a probablement pas été conservée.

Comment s’est déroulée la vie du musicien militaire Van Rosmalen?
Un point remarquable dans sa vie fut incontestablement le fait, mentionné dans le journal quotidien d’Amersfoort (Amersfoortsch Dagblad) du 2 janvier 1920, qu’à partir du 1er janvier (1920) M. J.J.H. van Rosmalen avait notamment été nommé maître de chapelle de la fanfare du second régiment de l’artillerie de campagne, alors qu’il était à ce moment-là soliste à la Chapelle militaire royale.

Dans le registre de la population de La Haye, il avait été noté sur la fiche signalétique que la famille avait déménagé à Tiel le 23 avril 1923. A cet effet, il est surprenant que la profession de musicien militaire indiquée en 1912 ait été remplacée par celle de maître de chapelle. Par arrêté royal du 24 avril 1959, il avait été décidé de transmettre la médaille d’honneur en or de l’ordre d’Orange-Nassau à cet artiste du village de Velp. Il est décédé le 29 avril 1963.

L’ouvrage pour le carillon
La marche de la paix dégage l’ambiance insouciante des marches de cette époque, sur laquelle John Philip Sousa avait entre autres un brevet. L’on ne sait pas si cette marche a été jouée fréquemment. Après la découverte en 2017, cette musique joyeuse a toutefois plusieurs fois retenti à des moments particuliers depuis la grande tour près du Palais de la Paix. Deux fois par semaine, un carillon réalisé grâce à des dons nationaux et internationaux y retentit depuis le 3 novembre 1994 (actuellement avec 48 cloches). L’instrument fait partie de l’International Network of War Memorial and Peace Carillons, en ligne depuis le 30 novembre 2017. La base de ce réseau a été établie au Palais de la Paix, une étape logique en raison du fait que La Haye a été désignée comme « capitale internationale du droit et de la paix ».

Pour commémorer le 100ème anniversaire du décès de Carnegie le 11 août 2019, les gestionnaires du réseau ont décidé de retravailler la marche pour carillon de Van Rosmalen et de la diffuser dans le monde entier après consultation avec le bibliothécaire.

A Dunfirmlne en Ecosse, le lieu de naissance d’Andrew Carnegie, dix cloches jouant automatiquement de la musique ont été installées en 1938 dans la tour nord-ouest de la cathédrale à l’occasion du 100ème anniversaire de la naissance de Carnegie en 1935. La série a ensuite été étendue jusqu’à 25 cloches et pourvue d’un clavier de piano pour le jeu de mains lors des messes le dimanche, de mariages et d’événements particuliers. On peut également y entendre cette marche joyeuse.

Source : Heleen van der Weel, carillonneuse au Palais de la Paix à La Haye (www.peacecarillons.org)